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©Marco Gregori

Hommage à Mathieu Michaud

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les membres du Comité, Mesdames et Messieurs, les enfants, Mathieu.

Voilà donc près de quatre ans que Mathieu Michaud arriva, par un temps estival sans doute semblable à celui-ci, pour être parachuté sur la terre du Servette, et devenir le directeur sportif du club de hockey sur gazon le plus mythique de Genève. Puisse la cérémonie d’aujourd’hui parachever la célébration de quatre saisons au sein d’un club que cet homme a animé, qu’il symbolise, et qu’il a fait entrer un peu plus dans la légende genevoise. Le sentiment profond, organique, millénaire, qui a pris depuis son accent de légende, a débuté dans un village de Belgique, d’où Mathieu est parti et où il va retourner. Il est d’usage, en Belgique, de fabriquer des champions de hockey. Quand Mathieu atterrit à Genève, porté par son ambition, sous la surveillance bienveillante de la vieille garde du Servette, la nuit qui se retirait comme la mer laissa paraître sur le Léman un coucher de soleil noir, jaune et… grenat. Genève attendait en silence, le coach qui ferait entrer le Servette dans une autre dimension.

Comment organiser ce club, pour perpétuer les valeurs historiques qui sont les siennes depuis plus d’un siècle, compétitivité, convivialité, pour en faire une inspiration pour le hockey suisse, un vivier de talents, amoureux du hockey et du beau jeu ? On sait ce que Mathieu Michaud pensait du Servette, au moment où il partit de Louvain : « Il serait fou et criminel de ne pas utiliser, en cas d’ambition olympique helvétique future, ce club prêt aux sacrifices les plus grands, épars et composé de talents bruts, mais pouvant constituer demain des équipes cohérentes de hockeyeurs, épris de sport collectif et de compétition, ayant choisi leur sport et déterminé leur objectif ».

C’est pourquoi Mathieu Michaud est venu à Genève. Grâce à Mathieu, les joueurs genevois, quel que soit leur âge, de l’équipe première à celle de nos U6, ont peu à peu appris que s’il est relativement facile de faire une passe, il n’est pas moins facile de faire une passe décisive ; s’il est facile de contrôler une balle, il est difficile de contrôler et de s’orienter vers le but à la fois. En un mot, les joueurs du Servette apprennent que la victoire collective est inséparable d’un entraînement intensif et d’une technique individuelle hors pair. Il faut que sur tous les terrains, romands, suisses et européens, les joueurs genevois imposent méthodiquement leur méthode, leur agressivité, leur volonté de vaincre, leur fair-play. Et un tel plan d’ensemble ne peut être conçu, et exécuté, que par le leadership d’un directeur sportif hors pair.

C’est ce à quoi Mathieu s’emploie jour après jour, peine après peine, une catégorie d’âge après l’autre. Mathieu Michaud, le plus humble de tous, n’a nul besoin d’une gloire usurpée : ce n’est pas lui qui a créé le Genève Servette Hockey Club un soir de décembre 1911. Ce n’est pas lui qui a sauvé Genève, le soir du douze décembre de l’an mil six cent deux. Mais c’est bien lui qui a été le Maître des batailles pendant ces quatre dernières années, sans jamais se moquer ni se rire des canailles ou des Lausannois. C’est bien lui qui était le patron des Genevois.

Le Servette a grandi, au point de devenir le plus grand club de Suisse, porté notamment par sa section junior, juniors, qui dès 3 ans, emplissent les maquis genevois. C’est le temps où, dans la campagne romande, nous interrogeons les aboiements des chiens en réponse aux cris de joie des supporters ; le temps où les maillots grenat, floqués de grands noms du hockey genevois, lèvent les bras dans la lueur du soleil suisse et se réfléchissent dans les eaux du Léman ; le temps des déplacements en Suisse alémanique, de ces cris de joie et d’excitation ininterrompus de nos enfants dans les trains… Mathieu et ses pépites du Servette rayonnent partout.

Voici le fracas des hockeyeurs genevois : Mathieu, grâce à toi, il n’y a pas que le foot dans la vie de nos enfants. Regarde, coach, surgir de tous les quartiers de Genève, les juniors du Servette. Regarde, mister, ton équipe première se qualifier pour la coupe d’Europe. Comme d’autres entrent aux Invalides, entre ici, Mathieu Michaud, avec ton magnifique cortège. Avec ceux que tu as entraînés ; avec tous les jeunes coachs et tous les arbitres que le club a formés, avec tous ces parents que tu as accueillis les bras ouverts et le sourire aux lèvres ; avec tes pairs des autres clubs romands que tu as sans cesse tirés vers le haut, pour qu’un jour, peut-être, le hockey devienne sport olympique en Suisse. Entre, avec ton peuple genevois, dans la légende du hockey suisse. L’hommage d’aujourd’hui n’appelle que le chant qui va s’élever maintenant. Chante aujourd’hui, jeunesse du Servette, cet hymne genevois. Écoute Mathieu : il va sonner pour toi.

Cé qu’è lainô, le Maitre dé bataille,
Que se moqué et se ri dé canaille,
À bin fai vi, pè on desande nai
Qu’il étivé patron dé Genevouai.

Alban de Sainte Marie

Photo : Marco Gregori